Skateboobs réinvente la culture skate pour les girls, les gays et les theys
« Avoir un crew de non‑mecs avec qui skater, c’est ce qui m’a donné envie de continuer, et on voulait que plus de gens aient ça : une communauté où iels peuvent vraiment être eux‑mêmes. »
En 2019, cinq skaters – Felix Ritchie, Eli Campbell, Greta Marzetti, Nancy Hankin et Meg Wriggles – se sont croisé·es dans un skatepark de quartier à Edinburgh. Ce qui n’était au départ que des sessions de skate entre potes s’est transformé en blagues partagées, en un compte Instagram décalé et en une ambition bien plus grande : faire bouger la culture skate. Lassé·es de voir les femmes, les personnes queer et les skaters non-binaires relégué·es aux marges d’une scène ultra masculine, ils et elles ont décidé de créer la représentation et la communauté qui leur avaient manqué. C’est comme ça que Skateboobs est né.
Le groupe s’est donné pour mission de réinventer le skate en un espace où chacun·e – quelle que soit son identité, ses capacités ou son âge – se sente bienvenu·e. À travers des meet-ups inclusifs, des sessions pour débutant·es et des événements centrés sur la communauté, le collectif œuvre à donner du pouvoir aux jeunes femmes et aux skaters LGBTQIA+ tout en créant des environnements plus sûrs et plus bienveillants, et en mettant aussi l’accent sur la santé mentale et le bien-être. En 2020, ils et elles ont imaginé des T-shirts pour récolter des fonds au profit de la charity CoppaFeel!, en collaborant avec des sérigraphes locaux pour mêler créativité et activism.
Nous avons rencontré plusieurs membres du collectif pour parler de leurs parcours, de leur impact et de l’avenir de Skateboobs.
Leur histoire avec le skateboard
Felix Ritchie (iel) : Enfant, dans une petite ville, il y avait peu d’endroits où traîner après l’école. J’ai commencé la trottinette à 12 ans, mais j’admirais toujours les garçons qui faisaient du skate. J’ai acheté un skate vraiment pas cher avec mon argent de poche et je me suis simplement amusé·e avec.
Eli Campbell (iel) : En grandissant, les médias autour du skate ne montraient que des hommes sur leurs planches et des femmes posant pour les marques, mais je savais que je voulais en faire, même si c’était considéré comme un « sport de garçons ».
Greta Marzetti (elle) : J’avais un peu testé, en cruisant autour de mon pâté de maisons avec un vieux skate grinçant, sans vraiment m’y mettre sérieusement. Je n’avais ni modèle ni repères, alors j’ai laissé tomber jusqu’à mon arrivée à Edinburgh, où j’ai rencontré Skateboobs.
Nancy Hankin (elle) : En grandissant dans une zone un peu rurale d’Écosse, il n’y avait pas grand-chose à faire. Il y avait un petit skatepark et j’y passais beaucoup de temps avec ma trottinette. Je regardais les plus grands skater, mais je ne m’y suis vraiment mise qu’en arrivant à Edinburgh.
Meg Wriggles (elle) : En grandissant, je n’envisageais même pas le skate comme une option. Je m’y suis mise à 18 ans, après que la nièce de mon partenaire, qui avait huit ans, a commencé à skater. Je me suis dit : « Si elle peut le faire, alors moi aussi, clairement ! » et je me suis lancée. Quelques mois plus tard, j’ai déménagé en Écosse et j’ai rejoint Skateboobs.
Hannah Schuller
Sur le nom « Skateboobs » et les débuts
Wriggles : Le nom vient du film Skate Kitchen, qu’on adore tou·tes. Un jour, on ajoutait des mots au hasard après « skate » et Skateboobs est resté.
Ritchie : Le nom reflète à quel point on prenait « au sérieux » Skateboobs au début. On était juste une bande de nouveaux amis, à tourner des petites vidéos de skate débiles, à revivre la joie pure de l’enfance.
Kristian Yeomans
Sur l’inclusivité et l’empowerment
Wriggles : L’inclusivité et la représentation, c’est exactement la raison pour laquelle on fait tout ça. Avoir un groupe de non-hommes avec qui skater, c’est ce qui m’a fait rester, et on voulait que plus de gens puissent avoir ça : une communauté où ils et elles peuvent vraiment être eux-mêmes. On organise toute une palette d’événements, des skate nights, des concerts, des ateliers créatifs, des cours de skate pour filles et des club nights jusqu’aux expos d’art, et chaque rendez-vous a son propre mood.
Marzetti : Les gens veulent simplement se sentir bienvenu·es et accepté·es, donc, où que je skate, j’essaie toujours d’aller vers les nouvelles têtes, de dire bonjour et de partager quelques tips. C’est un sport intimidant – physiquement et mentalement – et un visage amical peut tout changer.
Ritchie : Au fond, notre façon d’agir, c’est simplement d’être là : créer de la représentation et occuper l’espace là où c’est nécessaire.
Eli
Garder le skate fun
Campbell : Tout le monde skate pour des raisons différentes, mais au cœur de tout ça, le skate peut être ultra créatif et complètement fou, avec des règles… ou aucune : tu fais ce que tu veux ! On n’essaie pas de devenir pros ni de gagner des compétitions ; on veut surtout partager les bienfaits du skate sur la santé mentale et le développement personnel.
Ritchie : Le fun et le jeu sont nourris de façon tellement naturelle au sein de Skateboobs, et c’est ce qui le rend si beau. On se concentre sur les valeurs clés et les centres d’intérêt du collectif, que l’on canalise dans l’art, les médias et la créativité. S’amuser devient facile quand on aime ce qu’on fait.
Angus Trinder
Comment le skate a changé ces dernières années
Ritchie : La scène skate a évolué de façon radicale. Les stigmas et clichés négatifs sont en bonne voie d’être démontés. Aujourd’hui, je suis tellement fier·e et à l’aise de skater en ville. Il y a dix ans, on pouvait s’attendre à des moqueries ou des regards de travers, alors qu’aujourd’hui, la pratique du skate est (la plupart du temps) célébrée.
Campbell : Je pense que le skate aux Olympics a aidé à faire reconnaître le sport, mais personnellement je préfère le côté créatif, sans règles, du skate. J’adore aussi la montée en puissance des expressions queer et féminines dans le skate. J’ai tendance à préférer les skateparks ou les edits où les skaters ont leur propre expression, autant dans leur style de skate que dans leur look. Je trouve que tout est bien plus progressiste qu’avant. La haine, c’est ringard.
Wriggles : J’ai l’impression que la scène a totalement changé depuis mes débuts. Un signe qui ne trompe pas : il y a quelques semaines, j’enseignais à des filles de sept ans qui me demandaient pourquoi j’avais commencé le skate si tard, à 18 ans. Elles ne comprenaient pas quand je leur expliquais que, quand j’étais petite, c’était surtout un truc de garçons.
Lewis Baillie
L’avenir de Skateboobs
Campbell : Honnêtement, pour l’instant, c’est continuer à être présent·es, à essayer d’organiser toujours plus d’événements. On a une collab avec Friday Skate Club pour sécuriser un spot indoor cet hiver, afin que la communauté puisse skater gratuitement pendant les mois froids. J’adorerais un jour organiser une sorte de retraite skate quelque part : camping en forêt, feux de camp, mini-rampe… que demander de plus ?
Wriggles : Beaucoup des Boobs ont quitté Edinburgh, donc on ne se voit plus en grand groupe comme avant, mais on anime des sessions hebdomadaires pour un groupe de filles de sept à dix ans sur une mini-rampe, et c’est hyper gratifiant. J’espère qu’on continuera à créer des choses (vêtements, événements, etc.), mais surtout, j’espère qu’on continuera tou·tes à skater.
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